Grandes écoles et fabrication de l’entre-soi

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Une étude a récemment épinglé les grandes écoles concernant le recrutement de leurs étudiants. En effet, l’Institut des politiques publiques (IPP) y démontre que, de 2006 à 2016, la diversité sociale et géographique des étudiants n’a pas progressé et que les filles demeurent sous-représentées. Rien ne semble venir bousculer la reproduction de l’entre-soi dans notre pays.
 
 
Surreprésentation des CSP+ parisiennes et franciliennes
 
Durant la décennie étudiée, les deux tiers des élèves de ces grandes écoles sont issus des catégories socio-professionnelles les plus favorisées (CSP+) alors qu’ils ne représentent qu’un quart de l’ensemble des jeunes de 20 à 24 ans.
 
De plus, dans les 10 % des écoles les plus sélectives, les enfants des CSP+ représentent 80 % des effectifs, alors que ceux dont les parents sont ouvriers ou sans emploi plafonnent à 5 %.
 
En outre, l’enquête révèle que sur les 324 grandes écoles françaises, un tiers se situent en Île-de-France. Le coût du logement et de la vie étudiante dans la capitale sont des obstacles qui peuvent faire renoncer ceux qui n’y vivent pas. Ainsi, la moitié des élèves des écoles les plus sélectives proviennent de seulement 8 % des lycées, dans lesquels les lycées parisiens sont surreprésentés.
 
 
Surreprésentation masculine
 
Durant la période étudiée, les filles ne constituent que 42 % des effectifs des grandes écoles alors qu’elles représentent 55 % des effectifs d’enseignement supérieur au niveau bac +3 à bac +5.
 
Cette inégalité est surtout marquée dans les écoles d’ingénieurs avec seulement 26 % de filles, alors que les proportions entre sexes sont comparables dans les filières de commerce par exemple.
 
 
Des dispositifs d’ouverture sociale peu convaincants
 
Depuis 2005, plusieurs programmes ont été mis en œuvre afin d’améliorer l’ouverture sociale de ces établissements. Par exemple, les Cordées de la réussite visent à développer des initiatives de parrainage et de tutorat à destination d’élèves scolarisés dans l’éducation prioritaire. Autre mesure : les Conventions éducation prioritaire - Sciences politiques dont bénéficient cent élèves chaque année sur des promotions de 1 500 étudiants.
 
Ces dispositifs, pour certains anciens, n’ont jamais été évalués. Ainsi, chaque école peut organiser le sien, sans coordination nationale. Étonnant et regrettable, car c’est l’argent public qui finance ces écoles.
 
 
L’avis du SE-Unsa 
 
Le constat est donc sans appel : le recrutement de l’élite de la Nation se fait encore et toujours dans un tout petit réservoir de jeunes (hommes) très favorisés et d’origines sociale et géographique similaires. Le pluralisme du recrutement des grandes écoles se heurte à une organisation inégalitaire qui ne peut générer que de la rancœur, et alimente le discours anti-élites fréquemment repris par l’extrême-droite.
 
Il est indispensable, pour affirmer le pacte républicain, de s’attaquer aux logiques d’entre-soi en agrandissant notamment l’assiette de la réussite scolaire.