Parcoursup 2021 : tout va bien, selon le ministère
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Voici ce que l’on peut lire dans le premier bilan de la campagne Parcoursup 2021 publié par le ministère : « Une procédure efficace au service des projets (…) des candidats », « plus de formations », « plus de propositions d’admission », « plus de places créées », « une plate-forme au service de l’égalité des chances » : si l’on en croit ce bilan officiel, illustré de nombreux chiffres, la campagne 2021 de Parcoursup fut une réussite.
Et si on prenait les chiffres affichés par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche dans un autre sens ? Et si on changeait de perspective en s’intéressant au verre à moitié vide ?
« Cette année, la procédure a concerné 931 000 candidats qui ont pu postuler via la plate-forme »
Si l’on considère que sur les 931 000 candidats, 715 006 étaient bacheliers, les 215 994 autres étaient en demande de réorientation, majoritairement des bacheliers 2020. Des étudiants potentiellement non satisfaits par la formation obtenue via Parcoursup 2020 ou déçus au fil de l’année par la formation qu’ils souhaitaient pourtant obtenir après leur bac, des jeunes ayant effectué un service civique, une année blanche, en attendant mieux … Il faut savoir que sur la plate-forme Parcoursup, leurs vœux sont étudiés après les néo-bacheliers.
« Au total, 590 000 bacheliers ont reçu au moins une proposition d’admission, soit 93% ».
Il en reste donc 125 006 qui n’ont pas eu « au moins une proposition d’admission » et pour lesquels le ministère ne dit pas ce qu’ils sont devenus. Par ailleurs, concernant ces 590 000 « (ayant) reçu au moins une proposition d’admission », les bilans dressés pour l’instant par le ministère ne disent pas si cette proposition les satisfait, ni à quel rang dans leur classement personnel de préférence cette proposition se situe. Impossible pour le ministère de le savoir puisque les vœux ne sont pas classés et ce n’est, de toute façon, pas ça qui lui importe le plus. Ce qui compte c’est que l’un des vœux, quel qu’il soit, formulés par ces jeunes ait été exaucé.
Un élément de réponse se trouve dans l’enquête d’opinion, réalisée entre le 7 et le 10 septembre 2021 par l’institut de sondage Ipsos à la demande du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche : il y est indiqué que sur le panel des 1 010 néo-bacheliers interrogés, 70% de ceux ayant été admis dans une formation sont satisfaits de la réponse. Si l’on reprend le fil rouge de notre verre à moitié vide, cela fait tout de même 30% d’insatisfaits.
On sait très bien que sur la plate-forme Parcoursup, comme auparavant sur APB, il y a des choix qui n’en sont pas vraiment, des choix dits de raison, des choix autrement appelés « plans B », voire C, D, …, des « plan de secours » : ce sont ces vœux formulés sur des formations dites « non sélectives » pour lesquelles il y a plus de chance de voir sa candidature retenue. Et de croiser les doigts pour que soit satisfait l’un de ses vœux de cœur, celui qui permettrait la concrétisation de ses projets.
Par ailleurs, ce premier bilan, dressé par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, ne vérifie pas si tous ces jeunes ayant reçu au moins une proposition d’admission ont réellement intégré la formation obtenue et, si ce n’est pas le cas, ce qu’ils sont devenus.
Revenons aux chiffres du bilan ministériel
« Cette évolution positive concerne aussi l’apprentissage (+ 16 % de candidats supplémentaires) » avec « un nombre de candidats admis qui a progressé de 18 % par rapport à 2020 »
Effectivement, plus de candidats admis pour les vœux en apprentissage, c’est bien : mais il faut préciser pour être juste que ces candidats ne valident définitivement leur vœu Parcoursup qu’à condition de retourner via la plate-forme un justificatif de contrat d’apprentissage, d’alternance. Et sur la recherche d’un employeur, Parcoursup n’accompagne pas les jeunes. Les lycées non plus d’ailleurs. De nombreuses admissions sur les vœux en apprentissage n’aboutissent donc pas forcément à une entrée en apprentissage.
De même, des centres de formation des apprentis (CFA), au vu des résultats scolaires de certains lycéens admis par la plateforme, décident de ne pas leur laisser un temps supplémentaire pour la recherche d’un employeur, alors qu’il reste de la place. Les responsables de la formation leur suggèrent de faire une préparation avec remise à niveau dans certaines disciplines en leur suggérant de repostuler l’année suivante au BTS par alternance sur lequel ils ont été initialement retenus.
+ 18% d’admis en apprentissage peut-être ! mais combien de candidats réellement entrés en apprentissage cette année ?
Conclusion du ministère
« Le bilan est largement positif : Parcoursup facilite à la fois l’entrée dans l’enseignement supérieur et l’élaboration du projet d’orientation (respectivement 73% et 66%). »
Sur le terrain, parmi les professionnels et dans les familles, une question est récurrente : comment se fait-il qu’autant de néo-bacheliers restent sans solution à la rentrée de septembre ? Voici quelques éléments de réponse :
- l’offre de formation (« plus de 2 400 nouvelles formations », peut-on lire dans le dossier de presse paru le 30/09/21) n’est pas assez en adéquation avec les demandes des futurs bacheliers, pourtant formulées dès le mois de janvier ;
- l’investissement dans l’enseignement supérieur, notamment en termes d’ouvertures de places, n’est pas à la hauteur des besoins et ce, alors que les candidats sont de plus en plus nombreux et que le ministère s’en félicite ;
- l’accompagnement individuel des lycéens pâtit d’un manque de moyens dans les lycées, et d’un nombre insuffisant de psychologues de l’Éducation nationale spécialisés dans l’éducation, le développement et le conseil en orientation scolaire (1 pour 1 500 élèves environ).
Reste un élément des résultats de l’enquête Ipsos sur lequel le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ne communique pas du tout : 82% des néo-bacheliers interrogés jugent la plate-forme Parcoursup « stressante ». Ce sera peut-être dans un bilan plus précis prévu courant octobre.