Mixité sociale en lycée : la ségrégation voit double

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Après avoir rendu publiques les données concernant les indices de positionnement social (IPS) des écoles élémentaires et des collèges publics et privés au mois d’octobre 2022, le ministère de l’Éducation nationale a publié le 10 janvier 2023, les IPS des lycées généraux, technologiques et professionnels.
 
 
Pour le SE-Unsa, une double ségrégation s’opère : la première concerne le tri social qui caractérise le recrutement des lycées professionnels, et la deuxième confirme le rôle décisif de l’enseignement privé sous contrat dans le séparatisme social en milieu scolaire.
 
 
Tri sélectif à l’issue du collège
 
Alors que la moyenne générale des IPS de tous les lycées est de 103,9 il apparaît une forte différence de recrutement social entre les lycées généraux et technologiques et les lycées professionnels. Ce n’est pas une surprise, mais il est désormais possible de chiffrer cet écart de composition sociale.
Alors que la moyenne des IPS des filières générales et technologiques est de 114,2 points, celle des lycées professionnels est de 87,4 points. Un gouffre de plus de 25 points les sépare à l’issue de l’orientation de fin de 3e.
De tels écarts sont aussi observables au sein d’un même établissement, quand celui-ci accueille des filières générales, technologiques et professionnelles.
 
Même si la voie professionnelle est un choix authentique pour certains élèves, c’est pour beaucoup d’autres une orientation subie, liée à des résultats scolaires fragiles. Or, le système éducatif français se caractérise par la très forte corrélation entre la réussite scolaire et le milieu social d’origine. Le tri social et scolaire opéré à l’issue de la 3e contribue à figer durablement les positions dans la société, alors que notre pays a besoin d’un bond en avant en termes de démocratisation scolaire.
 
 
L’enseignement privé sous contrat : séparatisme social à tous les étages du système éducatif
 
Comme cela est apparu lors de l’analyse des IPS des écoles élémentaires et des collèges, l’enseignement privé sous contrat se caractérise par son rôle décisif dans l’entre-soi scolaire de la frange la plus favorisée de la population.
En filière générale et technologique, alors que la moyenne nationale des IPS est de 114,2, elle est de 121,6 dans le secteur privé sous contrat, et de 110,3 dans le secteur public.
Sans surprise, celle des 350 LP privés sous contrat est supérieure de plus de 10 points à celles des 780 LP publics (94,4 / 83,3).
 
 
L’avis du SE-Unsa
 
La publication des IPS des lycées donne un éclairage supplémentaire sur le visage aristocratique de notre système éducatif. Cela s’exprime dans l’orientation en fin de 3e qui s’apparente à un tri social et scolaire qui va canaliser des élèves en lycées généraux et technologiques et en lycées professionnels. À cela s’ajoute le deuxième tri effectué par l’intermédiaire du spécialiste du séparatisme social à l’École : l’enseignement privé sous contrat.
 
L’état de la mixité aux lycées est le reflet de la persistance d’inégalités scolaires qui pénalisent la scolarité des élèves issus de milieux sociaux modestes. Cela ne peut qu’amener du désespoir et de la rancœur chez les personnes concernées. À terme, cela remet en cause notre avenir démocratique.
 
Un regard erroné sur cette situation pourrait laisser croire qu’il s’agit de problématiques circonscrites au champ d’action du ministère de l’Éducation nationale. Mais cela concerne la société toute entière et interroge la manière dont on veut faire République dans l’École et par l’École.