Inégalités scolaires : le mal français
L’OCDE pointe l’incapacité de la France à endiguer ce phénomène, et met en lumière des écarts de réussite considérables en fonction de l’origine. Ainsi, les élèves dont les parents ont un diplôme du supérieur ont 14 fois plus de chances que les autres d'être également diplômés du supérieur, contre 4 fois plus au Canada, en Suède ou en Finlande.
La France donne moins à ceux qui ont moins
Cette étude est étayée par un rapport du CNESCO publié le 24 octobre 2018, portant sur les inégalités territoriales entre les collèges publics d’Île de France. Les collèges privés ne sont pas inclus dans ce rapport car les chercheurs n’ont pas pu obtenir leurs données statistiques. La transparence attendra…
Ainsi, l’étude montre que dans les zones cumulant les difficultés sociales, le taux de contractuels est plus élevé, les enseignants titulaires sont plus jeunes et la stabilité des équipes est moindre. Cela va dans le sens d’un rapport parlementaires de mai 2018 qui soulignait que le plus doté des collèges de Seine-Saint-Denis, est moins doté que le moins doté des collèges parisiens. Par conséquent, les résultats aux épreuves écrites du brevet varient de 15 % à 60 % selon les établissements de région parisienne. Cette amplitude est parfois présente à l’intérieur des départements, comme dans les Yvelines, où les résultats des collèges situés banlieues résidentielles sont très bons ; c’est le contraire pour ses territoires très défavorisés. Toutes ces données révèlent une mosaïque d’éléments, qui expliquent pourquoi l'école française reste l'une des plus inégalitaires des pays développés.
La mixité scolaire en berne
Le CNESCO indiquait en 2016 que toutes ces politiques et les budgets afférents resteront très peu efficaces si les écoles et les collèges les plus ségrégués ne font pas l’objet d’une politique volontariste de mixité sociale.
Cette situation est aussi observée par le rapport de l’OCDE, qui remarque que la moitié des élèves défavorisés sont scolarisés dans des écoles « au profil socio-économique défavorisé ». Même si certains établissements ayant des publics fragiles réussissent à avoir de bons résultats, cette concentration de difficultés conduit à des écarts scolaires immenses : le fossé qui se creuse entre les différentes parties de la jeunesse est devenu un gouffre.
D’autres pays ont connu des difficultés similaires et s’en sont sortis par des politiques volontaristes : le CNESCO indique qu’en Belgique francophone, les périodes d’inscriptions aux écoles ont été uniformisées. Les publics défavorisés sont autorisés à s’inscrire avant l’ouverture officielle des dates d’inscription. Aux États-Unis (Massachusetts), le choix des parents est encadré, afin qu’aucune école ne dépasse de plus de 15 % le taux d’élèves défavorisés parmi sa population.
En France, des initiatives ont été menées, notamment à Toulouse, Amiens, Paris… Leurs retours d’expériences pourraient servir à généraliser ces recherches de mixité, mais l’impulsion politique nationale n’est, pour le moment, pas à la hauteur des enjeux.
Pour le SE-Unsa, il est urgent d’agir
Pour le SE-Unsa, notre système doit viser, pour de vrai, la réussite de chaque élève, quels que soient son origine, son parcours et son territoire. La recherche de mixité doit être cultivée sur tous les territoires, ce qu'empêche, en partie, l'enseignement privé qui concentre 40 % d'élèves issus de catégories sociales favorisées alors que le public en compte moins de 20%. Il faudra changer de paradigme pour aller vers une définition de l’école comme institution structurante de la société visant l’émancipation de tous, au lieu d’une définition managériale, la considérant comme avant tout génératrice de savoirs mesurables. Cette dernière voie est connue : c’est celle de la compétition sociale dont la compétition scolaire est une des nombreuses déclinaisons et qui aboutit à la ségrégation scolaire d’une partie de notre jeunesse.