Métacognition : quand le CSEN réinvente l’eau tiède.

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Le Conseil scientifique de l’Éducation nationale (CSEN) vient de publier un « document d’analyse qui explicite les fondements scientifiques et les enjeux pédagogiques de la métacognition et de la confiance en soi » signé par la philosophe Joëlle Proust dont les travaux les plus récents ont porté sur la métacognition.
 
Aux enseignants familiers de ces sujets, la lecture de ce copieux document de cinquante pages n’apportera rien.
On y évoque, dans l’ordre, la zone proximale de développement de Lev Vygotski (mort en 1934), le sentiment d’auto-efficacité théorisé par Albert Bandura (2003), l’efficacité du but de performance qui est connu depuis les années 1980, les travaux de Fleming, Dolan & Frith en 2012 portant sur les sentiments métacognitifs prédictifs, l’importance des biais sociocognitifs comme la menace du stéréotype par exemple (Claude Steele 1997), l’importance des feedbacks bienveillants, le fait que l'évaluation formative en cours d'apprentissage est un outil puissant d’engagement des élèves et donc d’efficacité des apprentissages, et au final que la métacognition est un des leviers du climat de classe.
 
Rien de nouveau sous le soleil donc. La lecture des dossiers de "Veille et analyse de l’IFÉ" nous en apprend tout autant, depuis des années, et dans un langage moins jargonnant. Les articles cités sont accessibles à tous en quelques clics via Google Scholar ou Wikipédia (auquel le dossier du CSEN emprunte d'ailleurs un schéma sans le sourcer).
 
Pour les néophytes, il est à parier que le vocabulaire et le volume de ce document sera un repoussoir de premier ordre.
Exemple : « La théorie alternative conçoit l'intelligence comme un potentiel de croissance ("growth mindset"). C'est l'idée que l'intelligence se développe en fonction de l'effort, des bonnes stratégies d'apprentissage acquises et mobilisées, et de l'aide apportée par autrui. Cette théorie de l'intelligence "incrémentale" ou "fluide" encourage les élèves à voir dans les défis scolaires des occasions d'apprendre et de devenir "plus intelligents". Ils sont plus flexibles devant les obstacles qu'ils rencontrent,en cherchant de l'aide ou des stratégies alternatives. Ils ont de meilleurs performances scolaires, même dans les transitions de cycles, qui, on le sait, sont souvent difficiles à gérer pour les élèves. »
 
La phrase conclusive de ce document permet, comme l’aurait dit Ferdinand Oury, de ré-inventer la roue : « Comme le montre bien la recherche, la communication entre l'enseignant et ses élèves avant, pendant, et après la réalisation des exercices, offre autant d'occasions, pour les élèves, de construire,au-delà des savoirs disciplinaires, leurs capacités de compréhension et de raisonnement. De sa qualité dépendent le climat de classe et le plaisir de travailler ensemble. »
 
Car finalement, que nous dit ce texte ?
  • Les élèves s’engagent davantage dans les apprentissages quand l’exercice qu’on leur propose leur paraît accessible et ils ont besoin de se sentir compétents.
  • Les élèves progressent mieux quand ils ont un but à atteindre qui les engage personnellement et qui ne soit pas uniquement « parce que c’est dans les programmes » et quand ils pensent qu’ils vont réussir la tâche.
  • Les élèves ont un comportement qui correspond à ce qu’ils pensent qu’on attend d’eux et s’enferment trop souvent dans des stéréotypes. C’est ainsi que les filles qui pensent être moins destinées aux domaines scientifiques s’y engagent moins.
  • Montrer à un élève ses réussites l’aide à progresser, contrairement à ce qui se passe quand on met l’accent sur les échecs.
  • L’évaluation la plus efficace est celle qui est réalisée en cours de formation, car elle permet à l’élève de mieux comprendre ses erreurs et d’y remédier en toute sérénité.
  • Les élèves qui réussissent mieux sont plus heureux en classe.
Autant d’évidences dans un document censé aider la communauté éducative à enseigner plus efficacement laisse pantois et rate totalement son objectif.