Incidences du projet de loi « contre les séparatismes » dans l’Éducation

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Le Conseil supérieur de l’Éducation a donné un avis positif à plusieurs dispositions d’un projet de loi plus vaste dont l’objectif affiché est de « renforcer les principes républicains ». Dans le domaine de l’Éducation, sont concernés l’instruction à domicile et le contrôle des établissements hors contrat. 

Très forte limitation de l’instruction à domicile
 
Le texte pose le principe de la scolarisation de l’ensemble des enfants aujourd’hui soumis à l’obligation d’instruction, soit les enfants âgés de trois à seize ans. La note de présentation indique que l’école est en effet au coeur de la promesse républicaine. Elle est le lieu des apprentissages fondamentaux et de la sociabilité, où les enfants font l’expérience des valeurs de la République et du vivre-ensemble.
 
Il ne pourra être dérogé à cette obligation de fréquenter un établissement d’enseignement public ou privé que lorsque la scolarisation sera rendue impossible pour des motifs tenant à sa situation ou à celle de sa famille. Ces motifs correspondront essentiellement aux motifs ouvrant aujourd’hui à l’inscription au Cned en classe complète à inscription réglementée.
 
Donner l’instruction à son domicile sera désormais soumis à un régime d’autorisation annuelle délivrée par les autorités académiques, qui continueront de s’assurer du respect du droit de l’enfant à l’instruction. 
 
Cette limitation de l’instruction à domicile permettra, selon la note du ministère, de mettre fin aux dérives auxquelles sont trop souvent confrontés les services de l’État : accueil dans des écoles clandestines d’enfants officiellement déclarés comme instruits dans la famille, carences graves dans l’instruction délivrée dans la famille, enfants non déclarés, etc.
 
Le SE-Unsa exprime ses inquiétudes depuis plusieurs années quant à la montée de l’instruction à domicile et milite pour que tous les enfants apprennent et vivent ensemble. La communauté éducative représentée au CSE s’est interrogée sur les motivations des familles qui font le choix de l’instruction à domicile. Aucune étude qualitative ne nous a été fournie. Que feront ces familles ? Elles risquent de se tourner davantage vers les établissements privés hors contrat que vers le service public d’Éducation.
 
 
Contrôle renforcé des établissements privés hors contrat
 
> Procédure simplifiée de fermeture 
 
L’article 21 instaure un régime de fermeture administrative des établissements d’enseignement privés hors contrat ainsi que des établissements illégalement ouverts. Il s’agit de permettre aux autorités, lorsque sont constatés des dérives ou des manquements graves et réitérés à la réglementation, d’y mettre fin dans les meilleurs délais, et ce dans l’intérêt des enfants qui y sont accueillis. Jusque-là, la fermeture ne pouvait être décidée que par les autorités judiciaires, ce qui conduisait à des délais très longs.
 
> Une garantie sur les contenus d’enseignement
 
L’article 23 prévoit une condition supplémentaire pour la passation, par un établissement d’enseignement privé, d’un contrat simple ou d’association avec l’État. Tout établissement privé souhaitant conclure un tel contrat, qui lui ouvre droit à un financement public, devra préalablement démontrer qu’il est en mesure de dispenser, selon la nature du contrat, un enseignement conforme aux programmes de l’enseignement public ou par référence à ceux‐ci.
 
 
L’avis du SE-Unsa
 
Pour le SE-Unsa, renforcer les moyens légaux qui permettent de fermer des établissements dont les pratiques mettent en danger les élèves qui leur sont confiés est une bonne chose. Néanmoins, l’ouverture de ces établissements n’est toujours pas soumise à autorisation et les interventions ne peuvent se faire qu’a posteriori. Parmi ces établissements, nombreux sont ceux qui recrutent en mettant en avant des « pédagogies alternatives ». Pour autant, ils ne sont pas tenus de communiquer leur projet pédagogique aux autorités académiques, un paradoxe que nous dénonçons. 
 
Les grands objectifs de ce projet de loi ont été présentés par le président de la République dans un discours de lutte contre le séparatisme islamiste et de réveil républicain. Si les dispositions présentées au Conseil supérieur de l’Éducation confortent l’École publique comme un pilier essentiel de la République, elles ne sauraient suffire.
 
S’attaquer résolument aux inégalités sociales de réussite scolaire, mettre fin aux ghettos scolaires par une politique forte de développement de la mixité sociale, sont indispensables si on ne veut pas que ces mesures soient ressenties comme une stigmatisation supplémentaire par les populations qu’elle vise.