IVG : légalisation en Argentine, espoir pour un continent

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Le Sénat argentin a approuvé le projet de loi légalisant l’avortement alors que celui-ci était considéré comme un délit depuis prés d’un siècle. Une révolution pour ce pays qui pourrait faire école sur tout le continent latino-américain : reconnaître un accès légal et sûr à l’IVG malgré l’opposition des lobbies religieux et conservateurs.
 
Victoire argentine après une longue lutte populaire
 
Cette nouvelle législation, adoptée par le Sénat le 30 décembre, rend caduque celle de 1921 basée sur les exceptions (permis en cas de viol ou de danger pour la vie de la mère) qui équivalaient à une interdiction de fait. Ainsi, chaque année, 270 000 à 500 000 argentines avaient recours à des avortements clandestins et 38 000 femmes étaient hospitalisées pour complications et certaines en succombaient.
 
Certes, cette loi est une promesse de campagne du président mais elle est l’aboutissement d’une longue lutte féministe notamment depuis la fin de la dictature en 1983. De plus, en 2015, des manifestations contre les violences faites aux femmes ont mis en avant celles subies lors des avortements clandestins.
 
Désormais, toutes les femmes et les personnes gestantes (prise en compte des hommes trans) auront la possibilité d’avorter sur une demande jusqu’à 14 semaines de grossesse. Ce délai pourra être dépassé en cas de viol ou de danger pour la vie de la femme. Même si les médecins et les institutions pourront se déclarer « objecteur », ils auront l’obligation d’orienter la patiente.
 
Exemple et source d’inspiration pour le continent latino-américain
 
Cette victoire ne doit pas occulter la situation de l’Amérique latine. En effet, 97 % des femmes en âge de procréer de cette zone vivent dans un pays où l’avortement est restreint voire interdit. Seuls la Guyana, l’Uruguay et deux provinces du Mexique l’autorisent. Ainsi, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 3/4 des IVG sont réalisées illégalement en Amérique latine, soit prés de deux millions chaque année.
 
L’accès à l’avortement légal y est extrêmement obstrué car ce continent est imprégné de patriarcat porté par les cultes catholiques et évangéliques. Ainsi, l’Opus Dei, très présent en Argentine, considère que l’avortement est un crime. Sur la même ligne, les évangéliques ont une influence croissante comme au Salvador où l’IVG est interdit depuis 1997 et au Brésil de Jair Bolsonaro où il est limité au cas de viol, de risque pour la mère ou de malformation du fœtus.
 
En dépit de ces forces conservatrices, l’exemple argentin montre que le changement est possible. Celui-ci pourrait intensifier la mobilisation des pro-avortements dans les pays latino-américains et cela d’autant plus que les féministes y ont tissé des alliances régionales et qu’une journée de lutte pour la dépénalisation de l’avortement a été institué depuis 2012. Déjà, des militants colombiens ont demandé récemment à la Cour constitutionnelle de supprimer l’avortement du code pénal. Au Chili, certains espèrent une nouvelle Constitution étendant les droits des femmes. Au Brésil, des militants attendent une décision de la Cour suprême qui pourrait décriminaliser l’IVG dans les premières semaines de grossesse. 
 
L’avis du SE-Unsa
 
Le SE-Unsa salue cette décision historique qui va permettre à la population argentine d’accéder légalement et de manière sécurisée à l’avortement. En effet, la reconnaissance de l’IVG comme un droit, et non comme une exception, est un véritable progrès des droits humains.
De plus, la détermination des militantes et des militants d’Argentine, pays moteur en terme de droits sociaux en Amérique latine, sera sans nulle doute une source d’amplification des luttes universalistes pour les droits des femmes.