“L’école change avec le numérique”, oui mais pas si simple...

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Les annonces du président François Hollande le 7 mai dernier concernant l’école numérique portent la volonté de faire changer l’école avec le numérique. Voilà qui va dans le bon sens, néanmoins les décisions annoncées soulèvent des questions et nécessitent des précisions.


Que devient la priorité au primaire ?

Pour l’équipement et la formation le président parle essentiellement du secondaire, or la culture numérique des élèves commence à se construire avant le collège, l’école primaire doit pouvoir y prendre sa part… De trop nombreuses écoles n’ont au mieux qu’une salle informatique (plus ou moins opérationnelle) et pas de connexion ni de terminal numérique dans les salles de classe ! Aucune incitation, aucune aide ne semble prévue pour que les communes équipent à minima chaque salle de classe dès la petite section de maternelle. Quelle formation pour les PE, chargés dans le cadre du socle commun d’éveiller les élèves à la programmation et de contribuer aux prémisses d’une culture numérique commune à construire ?


Quelle équité ?

François Hollande a annoncé que l’État allait donner 1 € pour chaque euro investi par les conseils départementaux, donc les plus riches pourront bénéficier de plus de participation de l’État que les moins riches ? Cela ne nous semble pas équitable !


Pertinence de l’équipement individuel ?

Même si le président a dit que chaque département serait libre d’équiper en ordinateurs ou tablettes au plus près des besoins des équipes, l’équipement individuel des collégiens, de 5e, semble être ce qui est prévu. Or ce n’est pas forcément le plus efficace et le plus pertinent. Équiper les professeurs/équipes qui ont un projet d’utilisation concret, avec le matériel adapté au projet, et pas forcément individuel pour chaque élève, limite le risque de voir le matériel inutilisé. De plus, un équipement de chaque élève suppose des gestions lourdes de flottes, des connexions très performantes… Être à plusieurs élèves autour d’une tablette ou d’un ordinateur, favorise le travail collaboratif, la réflexion sur les usages, la prise de distance réflexive. Ne faudrait-il pas plutôt inciter à l’équipement des professeurs/équipes plutôt que des élèves qui ont souvent un meilleur équipement personnel chez eux ? Des aides à l’achat ou des prêts pourraient être prévus pour les élèves (boursiers par exemple) non équipés, ce qui serait moins lourd, moins coûteux à gérer et plus équitable au final.


À propos des contenus 

Les contenus créés par les enseignants ont été évoqués, c’est une bonne chose mais avec quelle reconnaissance, quelle contrepartie ?

Les aides aux entreprises innovantes ne pourraient-elles pas être aussi attribuées aux enseignants qui produisent des contenus et ont créé leur entreprise ? Il faut aussi penser aux start-up faisant des propositions novatrices qui ne sont souvent pas aidées.

À aucun moment, les élèves ne sont envisagés comme étant aussi potentiellement créateurs de contenus, alors qu’il faudrait encourager et soutenir les propositions d’outils et services allant en ce sens.

La grande plateforme annoncée “qui assurera la diffusion et le partage de toutes les ressources entre tous les professeurs et tous les élèves ; qui contiendra tous les contenus, produits par les éditeurs scolaires mais également les entreprises innovantes, les enseignants eux-mêmes” quelle est-elle ? S’agit-il de Viaéduc (https://www.reseau-canope.fr/actualites/actualite/viaeduc-le-nouveau-reseau-professionnel-des-enseignants.html), le réseau des enseignants proposé par Canopé, ou d’autre chose ?


Les contenus enseignés ?

La focalisation est trop grande sur l’informatique/la programmation/le code au détriment de la culture numérique
(plutôt que digitale) qui devrait être une préoccupation centrale et transversale. Si ce qui est annoncé pour l’élémentaire et le collège est assez clair au vu des projets de programmes en cours (c’est beaucoup plus flou pour le lycée). Qui va assurer les cours d’informatique annoncés en seconde ? L’extension de l’ISN (Informatique et sciences du numérique) va-t-elle concerner toutes les filières ou seulement celles du lycée général ? Quel est le calendrier ?

Réussir à faire changer l’école avec le numérique, au plus près des besoins des élèves et des attentes des enseignants, sans gâchis d’argent public, est essentiel pour nous. C’est pourquoi, à notre demande, le SE-Unsa sera prochainement reçu à la DNE (Direction du numérique pour l’éducation) au ministère pour poser ces questions et rappeler nos 10 propositions pour une école connectée au XXIe siècle.